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Interview Pierre Minassian, architecte lyonnais

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par Archipad
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Homme travaillant derrière un plan et souriant à la caméra

Pierre Minassian, gérant de l’agence AUM Pierre Minassian, est une figure montante de l’architecture contemporaine dont les projets suscitent un engouement médiatique important.

Pierre Minassian ouvre son agence d’architectes en 1999 à Lyon avant de créer AUM Pierre Minassian avec Yves Duvernois (agence de Roanne) et Benoît Thomas (agence d’Oyonnax). En 2010, il reçoit le Grand Prix d’Architecture attribué par le CAUE du Rhône pour la très médiatisée « Maison Biscuit ». Présente dans cinq villes de France, l’agence AUM est sollicitée pour des projets publics et privés d’envergure. Sa production se caractérise par un style minimaliste dans la forme du bâti et dans les matériaux utilisés : béton brut, pierre, acier et verre. Pierre Minassian accorde une place prépondérante à l’approche environnementale de son métier.

Pourquoi êtes-vous devenu architecte ?

Fils d’architecte, j’ai grandi dans un environnement connecté à ce domaine. Mais, l’architecture est avant tout pour moi une vocation qui correspond naturellement à mon goût pour le dessin, pour l’art, pour tout ce qui est manuel. Dès le début de mes études, j’ai été très motivé par certains sujets, l’habitat individuel notamment.

Par quels architectes êtes-vous influencé ?

Dans nos métiers, nous sommes influencés tous les jours par tout ce qu’il se passe, tout ce que l’on voit. Très souvent, notre métier consiste à oublier ces influences pour tracer notre propre chemin. Mais, si je devais citer quelques architectes fondateurs importants, je commencerais par Oscar Niemeyer et Ludwig Mies van der Rohe. Une multitude d’architectes contemporains nous inspire en réalité, dont des architectes actuels avec lesquels nous sommes amenés parfois à travailler. Nos influences ne sont pas toutes liées à l’architecture, notre approche du métier se nourrit de l’art en général, d’artistes contemporains que nous aimons, de la nature aussi. Nous travaillons beaucoup avec des formes assez ludiques.

Quels matériaux aimez-vous travailler ?

A l’agence, nous sommes spécialisés dans les matériaux bruts très peu modifiés : le béton, la terre, la pierre, le bois, l’acier… Le béton est un matériau particulièrement intéressant pour un architecte car il est très sculptural. Il se prête à toutes les formes, il autorise toutes les expériences, ce qui n’est pas le cas du bois ou de l’acier qui fonctionnent en poteau-poutre, ou de la terre crue qui n’a que peu de portance. Le béton est le seul matériau qui peut tout faire :
murs, poteaux, sols, plafonds…

Vos bâtiments ont des lignes très pures. Est-ce un des principes phares de vos conceptions architecturales ?

Au sein de l’agence, nous essayons de faire ce que j’appelle de l’architecture vraie, c’est à dire que nous dessinons un bâtiment en répondant au cahier des charges qui nous a été donné. Nous respectons ce cahier des charges dans la forme jusqu’au point le plus extrême et le plus intègre possible. Nous avons développé des brevets qui nous permettent, par exemple, de faire des fenêtres avec châssis dans des dimensions qui n’existent pas, d’utiliser des enveloppes béton en intégrant à l’intérieur les isolants pour qu’ils soient invisibles… Grâce à tout cela, la lecture de nos bâtiments est très épurée alors même que ces projets sont en réalité extrêmement techniques car ils intègrent des éléments complexes et multiples. Nous appliquons toujours nos concepts avec la plus grande rigueur pour amener la forme à une lecture la plus pure possible.

Mais qu’est qu’un bâtiment réussi à vos yeux ?

C’est une question très difficile. Un bâtiment ne peut être réussi que si on s’y prend de la bonne manière. Après, certains de nos bâtiments ont eu plus de succès que d’autres, certains ont reçu des prix, d’autres ont été classés. Pourquoi ceux-là ont-ils eu plus d’impact que d’autres ? Je pense qu’ils ont, d’une certaine manière, mieux répondu aux questions que l’on se pose quand on travaille sur un projet. Quel sens veut-on donner au bâtiment, au sens philosophique du terme ? Quel est le concept, quelle est la direction ? Quel dialogue veut-on avoir avec le site, un point très important à mes yeux ? Comment intègre-t-on le fonctionnement d’une manière pure et ergonomique ? Si on arrive à pousser tout cela à l’extrême dans un bâtiment, il devient l’essence de la conception de l’architecte. Mais après, le reste est un mystère. Pourquoi un bâtiment plaitil au public ? C’est une rencontre avec celui qui regarde, avec celui qui y habite… Il y a bien sûr des facteurs culturels et sociaux, mais aussi d’époque. L’habitation individuelle d’exception répond à des problématiques de notre époque : on n’habite plus de la même manière, les pièces s’enchaînent autrement. Chaque époque a son style et nous construisons pour notre époque.

Vous inscrivez-vous dans une démarche écoresponsable ?

C’est un sujet d’actualité très ambigu. Nous sommes tous très impliqués parce que la transition écologique est une préoccupation majeure. Nous sommes dans une période de stress, d’inquiétude et d’incertitude car nous n’avons pas les moyens de prendre les décisions. Les lobbies pèsent lourd et nos élus font ce qu’ils ont toujours fait : ils prennent des décisions d’affichage. Ils interdisent tel ou tel matériau alors qu’il serait bien plus efficace de pousser les matériaux les plus performants. Aujourd’hui, nous avons besoin de savoir produire autrement. Les solutions techniques dans la construction ne sont pas encore au point. Certaines marchent bien mais nous n’avons pas encore atteint la révolution technique de la construction. Nous sommes dans une phase transitoire qui nous oblige à faire le mieux possible avec les moyens du bord. Pour faire évoluer les choses, des décisions à long terme doivent être prises. Il ne faut
pas interdire certains matériaux du jour au lendemain, il faut donner des délais précis et raisonnables aux industriels pour qu’ils aient le temps de développer des solutions fiables et performantes. Interdire brutalement est idiot car les industriels contournent presque systématiquement ces interdits en proposant des solutions cosmétiques qui ne valent rien la plupart du temps.

Quel est l’apport des innovations technologiques dans votre métier ?

Il y a quelques années, nous avons été poussés à travailler en mode BIM. Ce passage en force a été critiqué, mais le BIM est très intéressant pour nous. Comme d’autres outils, le logiciel de suivi de chantier Archipad par exemple que nous utilisons au sein du cabinet, le BIM favorise un mode de travail très collaboratif dont nous avons besoin dans notre métier. Ces nouveaux outils nous permettent de communiquer facilement avec tous les corps de métiers, avec nos clients qui, pour la plupart, seraient sans cela dans l’incapacité de lire nos fichiers.

Le cabinet a reçu de nombreux prix. Lequel vous rend particulièrement fier ?

Deux d’entre eux ont beaucoup d’importance pour moi. Le grand prix d’architecture que nous en avons eu en 2010 pour une petite maison de la région de Lyon, « la maison Biscuit », est une récompense qui me tient à cœur, sans doute parce que j’étais personnellement impliqué dans les travaux de construction. Le second prix n’en est pas un car c’est une distinction. Un de nos bâtiments, « la maison au bord du lac », située sur les rives du lac de Genève, une maison tout en transparence qui communique avec le paysage qui l’environne, a été classé monument remarquable. C’était une récompense étonnante, elle n’a pas changé ma vie, mais c’était une belle satisfaction.

Si vous ne deviez parler qu’une de vos réalisations, laquelle choisiriez-vous ?

La White Snake House, le serpent blanc, une maison posée sur un lac d’un hectare que nous avons finie il y a une quinzaine d’années. C’est un bâtiment assez intéressant sur lequel nous avons une multitude d’anecdotes de rencontres, de chantier… Ce projet a été une vraie expérience de vie. Mais pour moi, l’architecture est toujours et avant tout une expérience. C’est l’expérience de vivre dans un lieu, le lieu étant le rapport que l’on met entre les éléments d’un site et les éléments d’un programme. Traverser une architecture est une forme d’expérience, comme l’est la traversée d’un lac à la nage. Je cherche à créer des lieux de vie et de rencontres uniques. Pour cette maison en particulier, nous étions immergés dans un univers différent, dans une région de forêts et de lacs, perdus au sein d’une propriété qui fait 80 hectares. La conception de ce bâtiment a été une expérience unique, un chantier complètement fou avec ces chevaux que nous devions faire intervenir à la demande du propriétaire… Cette maison construite sur
pilotis donne l’impression de deux boomerangs qui se rencontrent sans toucher l’eau.

(c) Studio Erick Saillet

Nous vous invitons à découvrir les réalisations de Pierre Minassian dans le superbe ouvrage AUM PIERRE MINASSIAN ARCHITECTE qui retrace le parcours architectural de l’agence à travers 32 projets illustrés de croquis, maquettes et photographies.
Dominique Amouroux, Sylvain Enguehard, Editions Jean-Michel Place, 300 pages, 45€

Photographie : (c) Vianney Tisseau

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